Souffrir de dépression (Nathalie Gauvin)

Tulipes-Nathalie Gauvin

À monsieur Serge Thériault
et à tous ceux qui souffrent de dépression

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Je connais bien ce mal infâme qui vous ronge, pour l’avoir, hélas, moi aussi courtisé de trop près à moultes reprises.

Silencieux, sournois, abscons, il instille en votre âme la plus abjecte des absinthes car plus on en boit, plus on en meurt: une innommable, une insondable souffrance.

Pour en connaître les plus intimes tréfonds, il faut y avoir trempé ses lèvres et goûté la griserie morbide de sa désespérance, la noirceur des aubes traîtres qu’elle vous promet et qui n’offrent aucun secours au combat que vous menez seul, à quérir en vain, ce sommeil qui depuis longtemps vous a déserté et pour lequel vous auriez donné des empires.

Elle vous laisse livide au cœur de ces nuits sans lune, à tenter de broyer inlassablement ce mal étrange qui, plus il agite votre esprit des tourments sans fin qui le rongent et le fatiguent au-delà de l’épuisement, plus il vous paralyse de son curare et moins vous avez d’emprise sur cette raison défaillante qui vous échappe sans que vous puissiez la retenir, glissant entre vos doigts entrouverts comme les grains de sable s’écoulent irrémédiablement au sablier du temps qui passe. Les nuits, les jours se confondent, votre solitude est votre seule amie, votre chagrin, votre seul amant.

Fidèles, ils hantent le désert des champs de ruines de votre vie, au milieu desquels vous êtes assis, contemplant votre détresse et ne sachant que faire pour retrouver les nobles palais d’antan que vous aviez bâtis et que la joie, le bonheur de vivre et l’amour animaient jadis de fêtes, de lumières et de rires.

Les parois de votre vie sont lisses désormais et rien ne s’y accroche qui ne glisse vers ces puits sans fonds où la térébrante ténèbre hurle son désespoir aride et tranchant comme un sabre de samouraï qui vous aurait transpercé le coeur.

Je connais vos luttes secrètes et les efforts de titan qui habillent le masque de vos sourires creux dont vous avez armé la coque de votre esquif pour échapper à la lame incisive des récifs qui vous broient et vous empalent.

Même vos prières sont vaines face au naufrage et votre carène à bout de souffle ne fait pas le poids face à la fureur de l’océan qui la malmène, la ploie et l’aspire sans pitié en son maelström.

Vous sondez l’insondable au cœur de ces fosses abyssales, là où aucune lumière ne brille, là où tous les silences hurlent des cris muets de l’agonie des épaves que la mer avale.

Et la mort vous apparaît soudain paisible, facile, tentante, presque comme une délivrance au mal de vivre qui vous déchire depuis aussi longtemps que le souvenir.

Et votre esprit vacille et tangue entre la déraison et la folie qui s’empare de ce qu’il vous reste de lucidité.

Voilà qu’à cette tristesse qui vous hante s’ajoutent les spectres de l’enfer, ces démons ignobles qui chuchotent à votre oreille de commettre l’irréparable…

La mort vous appelle et vous séduit comme une sirène vous promet une île en refuge au milieu de la tempête.

Et cette fallacieuse mélopée achève de fracasser votre âme sur les parois acérées des falaises contre lesquelles l’océan, dans sa fureur impitoyable la projette.

Comment reconstruire ce qui s’est brisé en mille éclats de verre et qui n’est plus qu’écume évanescente sur une rive désertée de toute espérance?

Comment regonfler les voiles de votre voilier, vous qui n’avez de souffle que l’ombre du vent?

Comment retrouver l’espérance au milieu du chaos infini qui a vampirisé ce qu’il y avait de plus sacré en votre âme meurtrie par toutes les noirceurs déliquescentes du néant et faire renaître l’improbable au cœur de l’impossible?

C’est un chemin de croix, une traversée du désert qui vous attend, un chemin rocailleux, semé d’embûches et de ronces, de chutes et de rechutes où vous aurez besoin…où vous aurez mal… où vous aurez soif…où vous devrez sonder l’insondable profondeur de votre âme mais sachez que vous y trouverez le divin qui est en vous, la force et le courage que vous ne saviez pas être vôtres, que vous apprivoiserez à nouveau la joie, l’espérance, la sérénité, la plénitude et que vous forgerez d’invincibles assises sur lesquelles vous saurez bâtir de nouveaux empires.

La joie, la paix, l’amour et le don de soi seront désormais vos porte-étendards et votre sceau et tous ceux qui vous prêteront allégeance et vous suivront porteront votre drapeau .

Si je vous écris tout cela c’est que j’ai mené ce combat et que j’ai triomphé de l’adversité qui vous afflige.

Si j’y suis arrivée, vous le pouvez aussi. Bien sûr il vous faudra chercher de l’aide. L’aide existe et vous attend, celle des médecins, celle des thérapeutes de l’âme et du coeur, celle de leurs élixirs…

La dépression est une maladie que l’on peut vaincre et nous sommes si nombreux à pouvoir en témoigner. Comme moi, sur votre chemin, vous trouverez des anges pour vous accompagner sur le chemin de la guérison et parfois pour vous porter quand vous sentirez que vous n’avez plus la force de vous battre et de vous relever.

Soyez patient et indulgent avec vous-même. Il n’est de victoire à célébrer qui ne se précède de plusieurs défaites préalables.

Mais vous y arriverez parce que toutes les réponses sont en vous, toutes les voies de guérison vous sont accessibles pour peu que vous tendiez l’oreille au divin qui vous habite.

Il vous éclairera de sa lumière et guidera vos pas sur le chemin de tous les possibles. Votre coeur et votre âme sont aussi précieux qu’uniques en ce monde.

Croyez en cette part d’éternité qui vous transcende et vous relie à l’infini de l’univers.

La vie est le moyen le plus subtil que possède l’âme pour s’incarner et expérimenter ce Dieu qui se cache dans chacun des instants qui vous mette au monde.

Tout est relié, vous, moi, l’humanité, tout ce qui est, tout ce qui sera et n’a jamais existé dans l’infini de l’univers. Et puisque pour renaître et muer le mal de vivre en rage de vivre il faut inlassablement mourir à soi-même, vous vous souviendrez qu’en cette seule existence, vous avez vécu, renoncé et perdu et mis fin à plus d’une vie, pour inlassablement vous réinventer et renaître, dans l’accomplissement de vos plus hauts destins et alors, mon ami, vous vibrerez de la fréquence de l’abondance et tiendrez dans vos mains ouvertes l’univers tout entier!

Une réponse à “Souffrir de dépression (Nathalie Gauvin)

  1. bonjour, j’ai reçue un très beau commentaire de Ghislaine Lavoie sur mon poème à monsieur Serge Thériault le jour de sa parution et mon editeur me dit qu’il a été approuvé. Le problème est qu’il n’est jamais apparue sur mon site comme si un bogue l’empêchait d’être édité et de paraître aux yeux des autres lecteurs. Pouvez-vous vérifier quel est le problème je vous prie?

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