Allons-y pour thèse/antithèse/synthèse. Ça rappellera des souvenirs à nos aînés, qui en leur temps devaient respecter cette sacro-sainte règle pour disserter, faute de quoi ils étaient recalés aux examens.
Thèse. La lassitude est un soupir. Une sorte d’ennui, d’atonie, de fatigue, comme si tout se vidait de son sens et de son intérêt. Vous vous levez un matin et ce mot est écrit sur tous les murs, sur le frigo, dans le miroir de la salle de bain et sur toutes les lignes de votre agenda. Rien ne vous enthousiasme, tout est imprégné de futilité, l’à quoi bon flotte comme une brume, tout pue de déjà vu. Rien de douloureux, certes, mais tout est lourd. Après l’envie de tout balancer, c’est l’envie de se recoucher et de s’endormir pour quelques siècles. Ce n’est pas la révolte, c’est l’absence. C’est un pourquoi sans réponse tellement ressenti qu’aucun comment ne peut venir à la rescousse.
Antithèse. La lassitude est un électrochoc. Vous vous levez un matin et elle vous demande, couteau sous la gorge, quelle est la différence entre hier et aujourd’hui. Sa violence vous fait chier. Elle n’est pas sur le frigo, mais à l’intérieur. Pas dans votre agenda, mais à l’extérieur. Vous la niez, vous la rejetez, vous voudriez la renvoyer se coucher, mais elle s’acharne jusqu’à ce que vous lui donniez raison. Et là, à ce moment précis où vous lui donnez raison, tout s’éclaire : sa présence n’est pas anecdotique. C’est le signe que vous vous êtes laissé piéger par la routine. Que vous n’avez pas su vous en prémunir. Que vous êtes en train de fondre pour glisser le long de vos propres murs. Que chaque journée qui passe est une journée synonyme de la précédente et donc insignifiante.
Synthèse. La lassitude est un formidable détecteur de mensonges et l’antithèse n’est pas toujours le faire-valoir de la thèse. La lassitude a l’immense pouvoir de nous alerter en allumant cette lumière rouge qui attire notre attention sur l’un des pièges dans lesquels nous tombons tous un jour ou l’autre : le piège du confort, et conséquemment du laisser-aller.
La meilleure façon d’éviter que la lassitude soit un soupir, c’est de se l’asséner tous les matins en guise d’électrochoc. Comme une douche froide. Essayez.