Ode à Jeanne, ma mère (Hélèna Courteau)

ÉLP

.

La lumière s’éteint

La marche de Jeanne est un glissement de chaussures
devenues pierres

Une robe sans forme
passée sur la chemisette de nuit,
tachée d’huile d’olive à la manche

Son regard passe au travers de ses enfants présentes
La colère durcit ses yeux
La mort est désirée

Au midi de sa vie
elle portait haut
le devoir des jours

Les saisons scolaires des filles
La liste des courses indispensables à la bonne
Les réunions à la chambre de commerce
L’inventaire hebdomadaire de la boutique

Y croire
s’y tenir

Le père accoste tous les vendredi
Au repas du soir la famille,
doucement euphorique se réunit autour de la matriarche

Elle s’attarde devant les reliefs du dessert.
Jeanne et Louis en ont long à écouter, à se dire

Au soir de sa vie
Des pauses aux dix pas allongent le trajet
son cœur bat la chamade

À la nuit de sa vie
Une chambre lui est assignée au Centre-de-la-Mauricie
Dans le lit, la vieille dame tient une place incongrue
L’ossature délicate se révèle imperceptiblement au mitan de sa couche dernière,
miniature comme celle d’ une enfant.

2 réponses à “Ode à Jeanne, ma mère (Hélèna Courteau)

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s